mardi 5 février 2008

ROUTE DE L'OR : CAP (HORN) DUR, DUR !!!!



La Route de l’Or est un parcours de record peu usité. En effet, rejoindre New York depuis San Francisco est un sacré périple. Faute de s’attaquer aux records de l’Atlantique, l’équipage du catamaran Gitana XIII mené par Lionel Lemonchois tente l’aventure sur un chronomètre largement à sa portée. Mais le Cap Horn se rappelle à la légende.

Lionel Lemonchois et ses neuf équipiers savaient la fenêtre étroite mais pensaient encore pouvoir s’y faufiler ce matin... Malheureusement, face aux vents violents et à la forte mer annoncés au Cap Horn dans la nuit de dimanche à lundi, Gitana 13 a été contraint de rebrousser chemin pour se mettre à l’abri.

Un refuge de quelques jours que les dix marins espèrent trouver le long de la Terre de Feu, à l’entrée du Détroit de Le Maire.

« Nous avons passé la première pointe du Détroit mais il y avait beaucoup trop de mer et nous avons décidé de faire demi-tour pour trouver un abri plus au Nord. Nous remontons actuellement sous 3 ris seuls» expliquait Olivier Wroczynski avant de poursuivre : « Nous observions depuis quelques jours cette dépression qui va balayer la pointe sud-américaine en fin de week-end. Hier, les fichiers météorologiques se montraient plus optimistes et nous laissaient envisager un passage du Horn dans la soirée de samedi. Mais ce matin, la situation s’est très nettement dégradée : 40 à 45 nœuds, grimpant en rafales entre 60 et 70 nœuds, sont prévus dans la nuit de dimanche à lundi … nous ne pouvons pas lutter contre cela.»

Déçus de ce contretemps, les hommes du Gitana Team positivaient néanmoins la situation : « Il est certain que nous aurions préféré ne pas nous arrêter, mais du coup nous profitons de notre proximité avec les rivages de la Terre de Feu pour admirer les incroyables paysages de ce bout du monde» concluait le doyen du bord.

Lionel Lemonchois et son équipage se remettront en route vers San Francisco, dès qu’une fenêtre météo plus favorable à leur passage dans l’Océan Pacifique se présentera.


Hier, au vu du tracé du catamaran de 33 mètres sur la cartographie, nous aurions pu penser que l’équipage de Gitana 13 profitait finalement d’une accalmie pour tenter de doubler le Cap Horn. En réalité, Lionel Lemonchois et ses hommes ont effectué cet aller-retour en direction du fameux promontoire afin de s’abriter au mieux des passages dépressionnaires successifs. De plus, les vents violents qui balayent actuellement la Terre de Feu rendent difficile - voire impossible - le moindre mouillage.

Malgré ce contretemps et cette situation peu confortable, l’ambiance demeure excellente à bord de Gitana 13. Ces journées d’attente sont pour les dix marins l’occasion de vérifier les moindres recoins du bateau. Un check-up général opportun après 7 000 milles déjà couverts et presque autant restant encore à parcourir.

Selon les dernières prévisions, une amélioration des conditions météorologiques est attendue dans la journée de mercredi

We are a team
Bien évidement, les jours que nous sommes entrain de vivre ne sont pas des plus faciles ! Notre cohésion, nous la devons à un objectif commun : aller le plus vite possible sur cette Route de l’Or. Hors là, depuis samedi matin, le temps s’est comme arrêté même si le chrono tourne inexorablement. Pas un d’entre nous n’ y fait allusion, pas un pour décompter les jours perdus, pas un pour retourner le couteau dans la plaie, pas un pour se plaindre ou tirer « la gueule »…Alors que dans cette « inaction » les petites manies des uns et des autres pourraient vite prendre des proportions importantes, la vie du bord reste un long fleuve tranquille, chacun s’appliquant encore un peu plus à respecter les autres.

Ce temps « mort », les bricoleurs l’utilisent pour bricoler. Deux drosses de barre ont été confectionnées, les anciennes donnant de dangereux signes de fatigue. Une épissure par ci, une autre par là, un palan réalisé, des sangles recousues, des trappes ré étanchéifiés, un nettoyage en règle de la cuisine, tout cela ne saurait cependant faire passer tout ce temps. Alors, les livres sortent des sacs mais également les langues se délient. Si l’on se connaît tous pour avoir parfois navigué ensemble, pour s’être croisés maintes fois sur les pontons ou le long des comptoirs lors de compétition tels que les Grand Prix des Multicoques, ce n’est pas pour cela que l’on sait tout de l’autre, loin de là. Alors on se découvre un peu plus, racontant nos vies, nos expériences, majoritairement nautiques, avec forcément à la clef de nombreuses connaissances communes jusque là insoupçonnées. Ces discussions informelles, à deux, à trois ou à beaucoup plus, nous ne les aurions certainement pas eu si nous avions continué notre cavalcade. Et si cela s’appelle faire « contre mauvaise fortune bon cœur », il n’en est pas moins vrai que cette épreuve dans l’épreuve ne fait que renforcer notre esprit de groupe.

Alors patiemment, nous attendons le bon vouloir d’Eole pour reprendre notre marche en avant. Une possible fenêtre semble se dessiner dans la matinée de jeudi. Ne voulant pas que cela tourne à l’obsession, nous avons tous pris du recul avec celle-ci, sachant bien que Lionel et Dominic sauront déclencher à temps le retour aux affaires. En fait, c’est comme si nous étions à nouveau en stand-by, fin prêts à réagir au passage du feu vert. Sauf que là nous avons toujours un bateau à gérer, avec des quarts, des réglages de voilure, une route à suivre... Celle-ci va nous mener aujourd’hui dans le Détroit de Magellan. Pour y faire quoi ? Du tourisme tout simplement. Nous ne sommes pas que des mangeurs d’écoute…Ah j’oubliais. Pour renforcer encore un peu plus le moral des troupes, celles-ci ont eu le droit cette nuit à un cassoulet en boîte. Au saut du lit, il n’y a pas mieux et merci Loïck ( Peyron) d’avoir laissé à bord ces boîtes, toi qui ne part jamais en mer sans en amener quelques unes.

Nicolas Raynaud


Le catamaran du Baron de Rothschild est toujours en attente. Il fait cap au nord, à 2,4 nœuds de vitesse. Sous mât seul, il est à la cape sous le vent de l’île de la Terre de Feu et attend des conditions meilleures pour reprendre sa course vers San Francisco via le cap Horn. Il a le temps… Le record est de 57 jours et Gitana XIII est parti de New York, il y a moins de vingt jours.