lundi 28 avril 2008

AG2R : Port de l'angoisse



C’est fait. Avec le passage de NIVEA Athlètes du Monde, les vingt quatre tandems encore en course ont franchi la porte de Porto Santo et commencent à dévaler la houle atlantique à la recherche des alizés perdus. Sous spinnaker, portés par un vent de nord-est soutenu, les équipages filent à plus de dix nœuds de moyenne. Si sur le pont la vie est belle, devant la table à carte, la tempête est dans les crânes. Pour tous ceux qui osent s’écarter de la route directe, c’est l’heure des incertitudes et de la petite boule qui serre le ventre…
«  Tu n’as rien à faire… Rien. Ou plutôt si, il suffit de siffler, tu sais comment siffler Steve ? » Si les choses étaient simples : s’il suffisait de faire comme le conseille Lauren Bacall pour savoir où aller, pour mettre fin au doute. Mais, visiblement les fichiers météo ont décidé de jouer avec les nerfs des navigateurs. Pour tous ceux qui sont restés aux avant-postes, ce début de traversée océanique a des allures de  « qui perd gagne ». Face à cette situation complexe, certains des leaders jouent la carte du silence radio : les meilleurs secrets sont ceux que l’on décèle le plus tard possible et plusieurs gros bras de la course étaient injoignables aujourd’hui. D’autres proposent une sérénité immuable, persuadés de leur bonne étoile ou adeptes des bonnes vieilles recettes de Monsieur Coué. A bord de Solar Inox, Luc Poupon avouait son plaisir de descendre vers le sud et sa confiance : « On a fait le choix de descendre plus sud d’après les données que l’on avait. Rien n’est évident, c’est pour cela que l’on est tous assez éparpillé. » Bertrand de Broc, en vieux sage, s’en remettait à une stratégie moins audacieuse, confiant rester dans une position d’attente tant que la situation ne s’était pas éclaircie. Jeanne Grégoire à bord de Banque Populaire avouait carrément, quant à elle le stress, qui la guettait au départ d’une option qui la tentait mais présentait un caractère assez radical : « Hier soir, on a vu des trucs qui nous ont confirmé notre décision. Aujourd’hui, je suis beaucoup moins confiante. A voir ! A l’heure actuelle, j’ai un peu une grosse boule au ventre. Par moments, la route du paquet Nord semble belle, alors qu’hier elle ne le paraissait pas. A voir, ça passe ou pas… »
 
Second souffle
Si pour les premiers, rien n’est facile, la situation est pain béni pour les poursuivants. L’incertitude donne des idées nouvelles au second peloton qui se voit déjà en escadrille de chasse. Miguel Danet sur Concarneau Saint-Barth reflétait bien cet état d’esprit : « On a la tête dans le guidon. Nous tentons ce qu’il y a à tenter. Ca passe, ou ça ne passe pas. Nous ne voulons pas avoir de regrets. On rigole bien. D’ici quatre ou cinq jours, nous aurons le résultat des options Sud. ». Même son de cloche chez Fabrice Amédéo sur Aquarelle Le Figaro :  «Nous avons eu deux jours difficiles. On a enfin franchi cette maudite porte de Porto Santo. Il n’y a plus qu’à remonter un peu le classement. On y croit. C’est incroyable. A la porte de Porto Santo, les chiens sont lâchés. Chacun choisit son option. On va au Sud, au Nord. Fini les navigations à vue.» Visiblement, le spleen du dernier bord vers Porto Santo est oublié et la perspective de pouvoir jouer un coup gagnant donne des ailes aux poursuivants. En vingt-quatre heures, l’incertitude a changé de camp… Hier les patrons savouraient les fruits mérités de leur première étape maîtrisée de main de maître. Aujourd’hui, leurs poursuivants voient une occasion exceptionnelle de revenir sur le devant de la scène. Où va donc se nicher la glorieuse incertitude du sport ?

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