samedi 3 mai 2008

Yannick Bestaven et Cervin EnR sur la transatlantique anglaise en solitaire



« Yannick est motivé. Il croit en ce qu’il fait. Il fait partie de ceux qui réalisent leur rêve. » confie un de ses plus proches complice et ami, le navigateur Ronan Guérin qui nous rappelle que la voile est un sport mécanique et qu’avant d’être un marin, il est important d’être un bon technicien, surtout pour la navigation en solitaire. « Je crois que nous nous sommes engagés dans ce sport justement parce qu’il comporte cette grosse part de technologie, cette démarche permet de rester toujours moderne ! » poursuit Ronan, Yannick est autonome et responsable, qualité première demandée au marin, donc au coureur au large. Pour faire le Vendée Globe, la technique, les connaissances météos et l'envie sont des atouts essentiels, il les possède. Tant mieux, ils sont prioritaires pour ce type d'epreuve. »

Yannick BESTAVEN, 34 ans, né le 28 décembre à Saint Nazaire

Etabli à La Rochelle avec Isabelle et leur petite fille Mona 3 ans.

La carrière de Yannick Bestaven est aussi fulgurante qu’atypique. Elle est semée de rencontres qui en ont modifié et accéléré le cours bien qu’aucune ne soit réellement dûe au hasard. Sa formation professionnelle, ses choix sportifs et ses engagements personnels ont tracé ce parcours qui devait logiquement le conduire au plus haut sommet de la course au large, à la barre d’un bateau révolutionnaire dans sa conception et sa remise en cause du mot « autonomie ».

Tout commence à l’adolescence dans le Sud Ouest avec la découverte du surf, de la planche à voile et du canoe Kayak qu’il pratique à haut niveau. L’adolescent aurait volontiers poursuivi ses classes en sport-études, mais l’autorité paternelle en a décidé autrement.
Yannick se dirige donc vers de longues études dont il exploite les bénéfices aujourd’hui : Etudes de Géomètre-topographe suivies du concours des Ponts et Chaussées. Il entre au Génie Civile et à l’Ecole des Ponts à Aix en Provence et le week-end, il retrouve sa tribu de planchiste autour d’Arcachon.

C’est à cette période, en 1997, qu’il croise un autre fou de planche à voile, Yves Parlier. Il l’aide à bricoler ses engins toujours très expérimentaux. Les deux ingénieurs échangent leurs analyses, se comprennent et se complètent. Yannick se pique de voile, saute la case « plaisance », et s’engouffre directement dans un champ de recherches et de compétition qui occuperont désormais tous ses temps libres.

1999 – Course de l’Europe – Victoire sur « Aquitaine Innovations »

Yves Parlier invite le jeune homme à rejoindre le bord pour la Course de l’Europe. Ellen MacArthur fait partie de l’expédition, elle s’initie au 60 pieds. Yannick est à bonne école. Le maître lui reconnaît déjà bien des talents :
- « Yannick est doté d’une intelligence brillante, il sait dépasser les difficultés, poser les problématiques et les gérer en autodidacte. Il est aussi très bon en météo et en routage, peut-être lui en ai-je donné le goût ? » suggère Yves Parlier qui ne l’imaginait pas encore seul à la barre de ce même bateau !

Première mini-transat : Yannick poursuit sa vie professionnelle. Il entre comme ingénieur au Port autonome de Paris et travaille à la restauration du barrage de Méricourt. Il y côtoie Lionel Hervé, directeur d’une des filiales du Port. Notez bien ce nom ! Par deux fois cet homme s’avérera être la cheville ouvrière des plus grands projets du jeune homme.

Yannick achète une coque de mini abandonné et entreprend de la restaurer. Il peine à financer son projet ; Lionel Hervé (premier coup de pouce) lui constitue en toute amitié un club de partenaires et sponsors qui l’aident à prendre le départ sous le nom d’« Arès Diffusion ».

La course est dominée par le fameux « Carène Liquide » dont Yannick récupère le moule et il lance avec Arnaud Boissière la construction de deux sisterships du bel étalon…

2001 – Deuxième Mini Transat, la Victoire.

Les bateaux sont prêts, mais toujours pas de sponsor pour éponger le crédit. La banque coupe les vivres, les fournisseurs s’affolent et sont à deux doigts de saisir les bateaux.

Spontanément, Yves Parlier se porte caution au moment où Aquarelle.com, déjà partenaire de Jeanne Grégoire, accepte d’étendre son sponsoring et de les supporter.

Mistral Gagnant. Le fleuriste place 3 bateaux dans les dix premiers
- Yannick Bestaven – Vainqueur de la Transat 6.50
- Arnaud Boissière truste la 3ème place et Jeanne Grégoire arrive 8ème

Deux « constructions – amateurs » sur le podium. Les apprentis n’ont rien laissé au hasard. « Yannick possédait toutes les qualités indispensables sur ce type de parcours. Il sait faire avancer un bateau, il sait se gérer lui-même, sans doute avait il un petit « Plus » en connaissance météo » analyse Yves Parlier avec un peu de recul.

2002 – 2003 – 2004 – 2005 – 2006 …

« Aquarelle.com » renouvelle le contrat avec le vainqueur qu’il accompagne en Figaro jusqu’en 2006.

Yannick enchaîne les préparations, les développements et les grandes courses au large. Il navigue sur les grands multicoques de 60’ (Banque Populaire), les Mumm 30’, les Figaro en solo et en duo, le plus souvent avec Ronan Guérin, et rejoint une nouvelle fois Yves Parlier sur son hydraplaneur lors de la Transat Québec/St Malo.

Yves le convainc d’aller voir son ex « Aquitaine », à l’abandon, en Normandie.

Le constat est affligeant. Le bateau n’est plus à la jauge, les travaux semblent colossaux. Les deux hommes s’entendent pour le racheter et le ramènent sous gréement de fortune à La Rochelle où il est mis à nu, désossé, contrôlé et sondé dans ses moindres structures.

Yannick est membre et même directeur d’une coopérative à La Rochelle, Quai 17, qui a pour objet d’aider les marins à monter leur projet de course et les assister d’équipes professionnelle et qualifiée. Les moyens sont mis en place, le bilan est clair : la structure du bateau s’avère saine, les matériaux n’ont pas vieilli. Ses lignes d’eau et son plan de pont estampillés du Cabinet d’architectes Finot, restent un gage de vélocité au portant. Mais les investissements de remise en conditions et de participation au Vendée Globe ne peuvent s’envisager sans le partenariat d’un investisseur conséquent…

Juillet 2007 : C’est à ce moment crucial du projet que l’on retrouve l’ami et défenseur des grandes causes, Lionel Hervé du Port autonome de Paris lui donne le contact de l’entreprise Cervin EnR. La jeune entreprise est à la recherche d’un territoire de communication en cohérence avec son activité. La réponse s’impose : le sponsoring dans la voile et le n° de téléphone d’un certain Bestaven qu’il avait accompagné lors de son ascension fulgurante en Mini 6,50 …

Deux mois plus tard, le 60 pieds portait les couleurs de Cervin EnR et le projet de développer des solutions novatrices pour permettre à un voilier en course de réaliser un Tour du Monde en autonomie totale, sans avoir recours aux sources d’énergies fossiles.

Un pari ambitieux que les ingénieurs du groupe Cervin EnR et d’Energies autour du Monde ont pris à bras le corps et dont les résultats seront vérifiés sur le Vendée Globe 2008/2009.

Le 60’ IMOCA CERVIN EnR, neuf mois pour faire peau neuve

Dès son retour du Brésil, et son sans-faute qualificatif dans la BtoB, le monocoque est entré en cale sèche à la Rochelle, où il a été totalement désarmé et reconditionné dans l’unique objectif de réaliser le Vendée Globe en fin d’année. Cette option grand’sud ne satisfait pas totalement aux critères attendus sur la route de The Artemis Transat.

En 1996, le plan Finot conçu pour Yves Parlier était un bateau innovant et un des plus performants du plateau. Il reste le plus léger de la flotte, moins de huit tonnes, et il est très simple comme le souhaitait son ancien propriétaire. Il suffit de comparer le dénuement de son plan de pont par rapport aux nouveaux IMOCA pour mesurer l’écart entre les générations. Cette légèreté pourrait se trouver améliorée d’environ 360 kilos de carburant inutile. Elle permettrait à Cervin EnR d’exprimer encore plus amplement sa puissance au portant, soit sur 70 % du parcours d’un Vendée Globe.

Des concurrents hi-tec : Puissance ou légèreté ? Deux chapelles se disputent la flotte des nouveaux 60’ pieds. Les jeux sont faits. Les « puissants » exprimeront leur potentiel dans des vents mediums et des mers contres, ils seront « physiques » et exigeants dans la brise… mais d’autres, et non des moindres, ont creusé le sillon de la légèreté, poussant aussi à l’extrême l’économie de poids et la sophistication des équipements.

Les voiliers de la nouvelle génération sont plutôt polyvalents, pas de trou dans le programme …les lignes sont moins radicales que chez Cervin EnR qui affiche clairement sont goût pour les longues glissades débridées. Aussi, Yannick et son équipe ont-ils planché sur les appendices et une nouvelle répartition de la voilure pour mettre un peu de « près » dans ce caractère bien trempé.

> Principales modifications : Le pont – Le cockpit - le gréement – les voiles …

• Un nouveau mât en carbone de 25 mètres a été installé.
• Voiles : Le triangle avant a été redessiné pour plus de puissance et de flexibilité dans le choix des voiles. Dès The Artenmis Transat, « Cervin EnR » disposera d’un nouveau génois (plus grand), d’une nouvelle trinquette (beaucoup plus grande), d’un ORC, de deux spis et d’un deuxième genaker. La grand’voile ne sera renouvelée qu’après la Québec Saint-Malo.
• De nouveaux winchs, et autres équipements…
• La quille était fixe, elle le restera. Le voile de quille est redessiné et le socle sera équipé d’un nouveau bulbe.
• Nouveaux safrans : autres profils pour une même surface.

> Caractéristiques du 60’ Cervin EnR
Année de construction : 1996
Architecte : Cab. J. M. Finot
Constructeur : Ch. Th Eluère
Long : 18,28 m
Larg : 5,85 m
Surf V. au près : 284 m²
Surf V. au portant : 480 m²
Tirant d’eau : 4,50 m
Hauteur du mât : 26,50 m
Safran : Double
Déplct : 8 Tonnes

Edition 2008 – Plymouth - Boston – Exclusivement réservée aux monocoques

Imoca 60 pieds : 15 engagés
Class 40 pieds : 10 engagés

Particularité de l’Edition 2008 : Embargo sur la communication tactique !

Dans le respect des stratégies de course de chacun, les organisateurs ont décidé de maintenir un Black Out de 36 heures, sans communiquer les positions des bateaux, une seule fois, lorsque le moment leur semblera chaudement tactique.

Deux bonnes raisons de s'engager dans le course

Avec pour ultime objectif le Vendée Globe 2008, l’engagement de Cervin EnR est un projet original et ambitieux mené par un skipper engagé, chef de file d’une nouvelle génération de marins, le rochelais Yannick Bestaven.

> Fallait-il participer à The Artemis Transat ?
Pourquoi se mettre ainsi en danger ? Le marin et le bateau avaient gagné leur qualification pour le Vendée Globe cet hiver, rien ne les obligeait à précipiter le grand chantier de restauration du 60 pieds, ni à se remettre en selle si tôt, en solitaire dans les redoutables conditions du Grand Nord…

Oui, indéniablement, parce que le projet Cervin EnR est à la fois sportif et écologique :

1 – Au plan sportif, à six mois du Grand départ, The Artemis Transat offre une occasion essentielle de tester en condition de courses et dans des latitudes extrêmes, les modifications apportées au plus ancien 60 pieds Imoca de la flotte.

Après une refonte totale des appendices, du gréement, du jeu de voile et de l’ensemble des circuits de navigation, le programme aller-retour de cette traversée de l’Atlantique permettra au skipper de valider en solitaire ses choix techniques et, au retour, en équipage, de le pousser dans ses retranchements, le tester dans des situations extrêmes et optimiser ce qui peut l’être avant novembre.

2 – Au plan du développement des sources d’énergies renouvelables. Cervin EnR et les ingénieurs d’Energies autour du Monde ont pour objectif de développer pour le Vendée Globe 2008, des solutions novatrices d’alimentation électrique pour leur bateau. Trois sources d’énergie principales ont été retenues pour alimenter les instruments du bord : le solaire, cœur de métier de Cervin EnR, l’éolien et l’hydrogénérateur. En fonction des conditions météo, de l’ensoleillement, de la situation géographique, ces trois sources d’énergie se relaieront et se compléteront. Les équipements embarqués pour the Artemis Transat sont expérimentaux ; ils révéleront en course leur fiabilité et leur capacité avant d’être finalisés pour le Tour du Monde.

• Dans une course au large en solitaire, telle que le Vendée Globe la défaillance du moteur est synonyme d’abandon.
• Le moteur alimente les matériels de navigation via des batteries : GPS, pilote automatique, radar, informatique de bord, logiciels de météo etc. Il consomme environ 450 litres de gazole pour 87 jours de navigation (temps record).
• Le moteur est obligatoire dans la classe IMOCA, il répond aux exigences de sécurité des courses au large, il permet en particulier de porter au secours à un concurrent. Cervin EnR devra obligatoirement embarquer un minimum de gazole pour répondre à cette norme.
• La consommation moyenne d’un 60 pieds IMOCA en conditions de course est d’environ 4.000 wattsh/jour (entre 200 et 300 Ah/jour).

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