Ils sont quatre équipages aux avant-postes de la route du sud : et trois de ces tandems comptent un coéquipier aux abords de la cinquantaine. L’expérience semble être devenue une denrée fortement appréciée sur le petit marché de la course au large. Seul un couple de jeunes chiens fous vient semer la panique dans le petit cercle fermé des vainqueurs potentiels de cette édition 2008.
« Concarneau Saint-Barth ? Ils ont trois poils sous le menton et ça se permet de nous traiter de vieux ! » Colère feinte de Monsieur Le Cam à la vacation de ce midi quand il apprend que l’équipage de Concarneau Saint-Barth a décidé « d’aller bousculer les anciens… » dixit Eric Péron, joint hier par téléphone… Mais force est de reconnaître que les quinquas mènent la vie dure aux jeunes loups de la course au large. Ne serait ce que ce jeune équipage de fesse-mathieu qui bouscule les conventions, on serait tenté de croire que les anciens ont repris le pouvoir. Et ce, pour le plus grand plaisir de certains, comme Jean-Paul Mouren, qui reconnaissait volontiers le culot des deux zigotos de Concarneau – Saint-Barth : « C’est bien. Il y a un peu de sang neuf et frais dans le vivier des vieux loups de mer… » Pensez-donc : en voici deux qui, quatre mois plus tôt ne se connaissaient pas, n’avaient pas cru bon d’user leurs fonds de cirés sur les mêmes bancs d’école de la course au large, qu’un océan séparait. Et les voilà qui se paient le luxe d’emporter le prologue de cette transat, de risquer l’option de tous les dangers et de se propulser comme qui rigole vers les sommets du classement !
La nuit des longues étraves
Gare toutefois ! La régate n’est pas finie et les vieux briscards comme les nouvelles icônes de la course au large fourbissent patiemment leurs winches dans l’ombre. Les options se réduisent mais la glisse demande des efforts constants et les habitués du circuit espèrent y reprendre la main. A bord de Lenze, Franck Le Gal y croit encore « Ca va super. On fait un concours de surf avec Erwan. Cette nuit, c’était un peu l’ambiance à bord. En journée on s’éclate, on surfe. La journée c’est plus rassurant mais la nuit on ne voit pas grand-chose. Quand on surfe à 12 nœuds on a l’impression d’aller à 20 nœuds. » Et il n’est pas le seul, loin de là. Passée la déception d’avoir vu les gars du sud leur griller la politesse, les ténors de la série Figaro, à l’instar de l’équipage de Suzuki, ont repris du poil de la bête. On modifie le rythme des quarts pour garder de la vigilance, on se penche sur le réglage du spinnaker en permanence : lâcher un nième d’écoute pour le reprendre dès que le surf démarre, relâcher un chouia dans le creux de la vague… C’est dans les détails que se construisent aussi les grandes victoires. Derrière ce paquet de furieux, chacun se pique au jeu de la vitesse et les records tombent : les surfs au-delà de quinze nœuds sont légion, ça mouille de partout, ça tangue, mais ça passe. Bien évidemment, certains ne peuvent éviter parfois la sortie de route : le bateau se couche, les voiles claquent, on redresse le bazar et dès que la sarabande redémarre on vérifie en hâte que le matériel n’a pas souffert… Le matériel, une obsession pour tous : « Je pense qu’il y a deux choses importantes : faire avancer le bateau à son maximum et préserver les voiles et le bateau. On va avoir du vent fort. Un bateau en bon état fera la différence avec les autres un peu plus abîmés notamment pour les spis… » Comme le notait Antoine Koch à bord de Sopra Group, il ne suffit pas d’aller vite, il faut aussi naviguer malin.
Pendant ce temps, la route du nord faisait silence aujourd’hui. Il semble bien que tous les voyants virent au rouge pour ceux qui ont animé plus des trois-quarts de la course et ce, de fort belle manière. Mais la course au large est parfois injuste avec ses prétendants. Erwan Tabarly, beau joueur et légèrement désabusé en convenait à la vacation de ce matin : « On a un peu l’impression d’être des rescapés. Le moral tient, mais on voit bien dans les classements que désormais, tout se passe au sud… » Au bout du compte, il y aura un premier et d’autres que l’on oubliera forcément un peu plus rapidement, même s’ils auront été les auteurs d’une course exemplaire. Sur cette course, on a vu aux avant-postes tour à tour, les valeurs confirmées du circuit Figaro, quelques vieux sages rompus à tous les coups tordus de l’océan et quelques jeunes impétueux sans complexe. Pour paraphraser le poète : le temps ne fait rien à l’affaire, quand on est bon, on est bon…
CLASSEMENT à 17:00
FINANCO
TROUSSEL Nicolas - PRATT Christopher
DEFI MOUSQUETAIRES
ROUXEL Thomas - ISRAEL Erwan
ATHEMA
TABARLY Erwan - BIARNES Vincent
mercredi 7 mai 2008
TRANSAT AG2R : Conflit de génération
Publié par vie-project à 5:01 PM
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