Vu du ciel, le Pacifique intrigue... Au Sud-Est, au large de l’île de Pâques, dans une vaste région grande comme la Méditerranée, le bleu profond des eaux a pris une nuance indigo, presque violette. Hypothèse : la zone semble très pauvre en activité biologique. En 2004, plusieurs équipes du CNRS, regroupées le temps de la campagne Biosope – « Biogeochemistry and Optics South Pacific Experiment » –, sont allées voir ce qu’il en était vraiment. Leurs travaux viennent d’être publiés dans Geophysical Research Letters et Limnology and Oceanography. Ils confirment la singularité de ce drôle de Pacifique, et que c’est bien la pureté de ses eaux qui leur donne cette couleur particulière. Dans le sillage de l’Atalante, le navire d’exploration de l’Ifremer affrété par le CNRS, des chercheurs du Laboratoire de microbiologie, de géochimie et d’écologie marines (LMGEM) du Centre d’océanologie de Marseille1 et du Laboratoire d’océanographie de Villefranche (LOV)2, coordonnées par Hervé Claustre, du LOV, ont jeté leurs bouteilles de prélèvement à la mer pour évaluer les quantités présentes de carbone, de bactéries, de particules en suspension. Et immergé des radiomètres, capables de mesurer jusqu’à près de deux cents mètres la lumière du soleil qui a pénétré dans l’océan. Comme prévu, la mer s’est révélée vierge, ou presque, de cette matière organique colorée, capable d’absorber le rayonnement solaire : exit les fameux nutriments qui permettent d’ordinaire d’alimenter bactéries et plancton et de faire marcher la pompe à carbone vitale pour l’équilibre climatique de la planète.
Jamais constatée ailleurs, cette pauvreté émerveille les scientifiques. « Une telle pureté optique est quasiment impossible à reproduire en laboratoire », explique André Morel, chercheur au LMGEM. « En principe, poursuit Marc Tedetti, du LOV, les océans sont enrichis de trois manières : par les apports des fleuves, près des côtes ; par les matières transportées dans l’atmosphère ; et par les remontées d’eaux profondes et riches en nutriments. Au large de l’île de Pâques, il n’y a rien de tout cela, ce qui en fait une région très pauvre en termes d’activité biologique. »
Conséquence : du fait de la faible quantité de matière organique colorée, de particules en suspension et de phytoplancton, le rayonnement solaire pénètre très profondément, près de trois fois plus que dans les eaux déjà très pures de Méditerranée orientale. Et du coup, « ces eaux donnent un point de référence de l’activité biologique dans un milieu extrêmement éclairé », explique Richard Sempéré, le directeur du LMGEM. De quoi même se faire une idée de ce que furent les prémices de la vie dans les océans.
mercredi 4 juin 2008
Clair comme l'eau du Pacifique
Publié par vie-project à 5:42 AM
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