jeudi 24 avril 2008

AG2R : Elodie Riou, élève appliquée



Après deux saisons sur Mini couronnées de résultats probants mais terminées par la perte de son bateau lors de la Transgascogne 2007, Elodie Riou passe à la «classe supérieure», réalisant cette année son rêve d'intégrer la classe Figaro. Entraînée depuis le début de l'année par Michel Desjoyeaux au sein de son écurie Mer Agitée, la jeune Bretonne attaque sa première course sur son KPMG, la Transat AG2R, au côté de Bertrand Castelnérac, décidée à apprendre, avant de monter en puissance. Une ambition servie par un caractère tenace...

"C'est un petit bout de bonne femme mais c'est un bout de grosse énergie." En une phrase prononcée le 3 avril dernier sur le Parvis de La Défense au moment du baptême de KPMG, Michel Desjoyeaux nous a dressé un portrait d'Elodie Riou qui n'est pas sans rappeler le profil d'une certaine Ellen MacArthur. Si cette dernière est aussi brune qu'Elodie Riou est blonde, force est de constater que derrière le même gabarit «petit format» de la Bretonne, on devine sans mal une détermination identique à celle de Dame Ellen. D'ailleurs, lorsqu'on lui demande de s'auto-définir, l'intéressée hésite à peine, lâchant d'un trait: "Je suis rigoureuse, j'ai de la volonté, je n'aime pas perdre et je suis vraiment prête à tout donner."

Autant de traits de caractère qui ne seront pas de trop au moment de tourner une nouvelle page de son cursus nautique, celle de la classe Figaro. Après s'être initiée à la compétition via le dériveur, d'abord en Laser Radial puis sur une préparation olympique en Europe, la jeune femme à la tête bien faite a frappé à la porte de son employeur, la société d'audit et de conseil KPMG, pour lui proposer de l'accompagner vers son nouvel objectif, la course au large. Ce qui fut fait de 2005 en 2007 avec des débuts en classe Mini loin d'être passés inaperçus, marqués notamment par une 7e place sur la course Les Sables-Les Açores à l'été 2006, ainsi que par des podiums sur l'Open Demi-Clé en 2006 et 2007.

De quoi aborder avec sérénité le grand rendez-vous de la classe Mini, la Transat 650 Charente-Maritime-Bahia 2007, mais patatras! Dans des conditions dantesques, le Bretonne chavire sur la Transgascogne en juillet, perd connaissance avant de se réveiller sur son KPMG et d'être hélitreuillée. "Ça ne m'a pas trop refroidie. Sur mon lit d'hôpital, je n'avais qu'une seule envie: repartir", expliquait-elle récemment dans Le Télégramme.

"J'adore la monotypie"

La skipper est sauvée, pas le bateau, ce qui la prive de sa première transat, mais pas du soutien de son employeur. Dès lors, Elodie Riou se met en tête d'aller voir au-dessus pour assouvir davantage ses besoins de régate: "L'étape Mini, c'était une étape de la course au large, mais en tant que régatière, mon rêve, c'était de faire du Figaro. Moi, j'adore la monotypie, tous les bateaux sont à armes égales, je trouve ça super." KPMG d'accord pour remettre au pot, la jeune femme attaque l'entraînement dès octobre au moment où ses anciens collègues «ministes» en terminent avec la Transat 650 au Brésil. Trois mois plus tard, la voilà intégrée à l'écurie Mer Agitée de Michel Desjoyeaux, ce qui lui permet de bénéficier d'un bateau, des infrastructures, d'un préparateur et, cerise sur le gâteau, des conseils du «Professeur» en personne.

"On m'a baptisé coach sportif, commente ce dernier, ça fait un peu pompeux, peut-être qu'on me prépare ma reconversion insidieusement. Ce qui est sûr, c'est que la demande qui était claire de la part d'Elodie était de lui faire gagner du temps. Elle vient du circuit Mini où elle était assez à l'aise et je pense, à la limite, que c'était trop facile pour elle, c'était pas assez dur, là, elle a pu voir depuis le début de la saison que effectivement, il y a une vraie marche. Le circuit Figaro est peut-être ce qui se fait de plus dur en matière de compétition sportive en solitaire à la voile." Outre les «petits trucs» destinés à lui permettre d'apprivoiser un bateau "moins fun car plus lourd qu'un Mini" (3 tonnes contre 1), «Mich' Desj'», qui navigue avec Elodie un jour par stage, l'initie surtout au large.

Desjoyeaux: "Sa démarche me plaît"

"Elle a un très bon passé de régatière puisqu'elle a déjà fait des préparations olympiques, ce que moi par exemple je n'ai pas fait. Par contre, elle a peu d'expérience du large puisque malheureusement, elle aurait dû faire la Transat 650 en 2007 mais elle a perdu son bateau. C'est donc beaucoup sur des aspects de course au large, de gestion en solitaire et en double que l'on discute." Et comment se passe la cohabitation ? "Ça se passe bien, Elodie a la pêche, elle est tout le temps motivée, même quand ça ne va pas, elle essaie de chercher les choses qui vont dans ses aventures, ça me plaît bien comme démarche. Et son autre métier d'origine l'oblige à être organisée et structurée, car quand vous enquillez les tableaux de chiffres et que vous êtes capable de les comprendre, sur un bateau à voile, c'est un peu la même démarche, même si ce n'est pas aussi austère qu'un bilan comptable."

Discours identique du côté de l'élève, ravie de bénéficier de l'expérience d'un marin qui a tout gagné en solitaire: "On est un peu pareils, dans le sens où je suis assez carrée, lui est aussi rigoureux, je pense que c'est pour ça qu'on s'entend bien." L'heure est désormais à mettre tout cela en pratique avec une première saison sur Figaro dont le grand rendez-vous sera la Solitaire fin juillet ("On va essayer d'aller jouer le classement bizuth"), et débute le 20 avril avec le départ de la Transat AG2R, sa toute première transat qu'elle courra au côté de Bertrand Castelnérac, rencontré en Mini, "un bosseur, quelqu'un d'assez dynamique sur l'eau et d'assez sympathique", selon la jeune femme.

L'objectif des deux novices ? "Sur la Transat, ce sera plutôt une histoire d'apprentissage car on est jeunes sur le bateau et il y a un niveau très relevé, il y a très peu d'amateurs. L'objectif est d'engranger le maximum d'expérience, d'acquérir des automatismes et des réflexes qui me seront précieux sur la Solitaire du Figaro". Mais vu qu'Elodie Riou confie "détester ramasser les bouées", nul doute qu'elle ne se contentera pas que de ça...

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