lundi 5 mai 2008

AG2R : A moitié vide, à moitié pleine




Statu quo sur la flotte ou presque : au nord, les acharnés de la route directe continuent de tracer leur sillon et manifestent leurs inquiétudes malgré un matelas de milles qui ferait envie à un usurier. Au centre, on tente de gagner dans le sud mais les dernières vingt-quatre heures n’ont pas toujours été à la hauteur des espérances. Au sud, on fonce pour espérer rattraper son retard. Mais personne n’est sûr de rien !

L’équipage de Concarneau Saint-Barth se prendrait-il pour l’animal à longues oreilles d’Alice au Pays des Merveilles ? « En retard, je suis en retard… » Concarneau Saint-Barth, l’œil rivé sur sa montre oignon affole les compteurs et se dirige d’un pas pressé vers la petite compagnie des supporters de Miguel Danet… Et pour l’heure, aucune Alice n’arrive à suivre son rythme. Au passage, l’équipage engrange jour après jour le « Trophée AG2R de la performance solidaire » qui récompense la meilleure performance du jour. Cela sera-t-il suffisant pour combler leur déficit ? Ce n’est pas sûr, mais nombre de marins commencent à lorgner dans la direction d’Eric et Miguel qui, s’ils ne gagnent pas, pourront toujours se dire, tel Cyrano, qu’ils emportent avec eux leur panache….

De panache, la flotte du nord n’en manque pas non plus : accepter de gravir l’Atlantique par la face nord, d’enquiller, comme des braves, des milles au près quand d’autres choisissent le chemin des écoliers pour débouler dans les alizés, témoigne pour le moins d’une sacré force de conviction. C’est ce qu’exprimait Erwan Israël à bord de Défi Mousquetaires : « On a eu la bonne nouvelle de voir Athéma ce matin. C’est assez sympa. Il y a eu deux jours difficiles mais le reste s’est bien passé. Nous n’étions pas avec les cirés. Nous avions 15 nœuds. Il y a deux ou trois fois où l’on s’est demandé ce que nous faisions là. Mais on est content de notre option. On fera les comptes dans quelques jours. » Même son de cloche à bord de Dégremont Suez source de talents : « On a une route mal pavée. Ca fait quasiment dix jours que nous sommes au près. On devrait enfin toucher du vent portant à partir du 6 ou du 7, mais ça reste une route compliquée. On joue plutôt une route nord directe », témoignait Alexandre Toulorge. Avant de reconnaître que « Dans les moments difficiles on se soutient. On apprend à se connaître… » Ce n’est pas la pluie qui tombe sans cesse sur Brest, oh ! Barbara, mais on a connu des jours plus confortables.

Espoir, intox ou résignation ?

Plus au sud, l’heure des comptes approche. Les rescapés de l’option nord, emmenés par Cercle Vert et Suzuki Automobiles tentent de rallier l’autoroute au plus vite. Visiblement, quelques menus travaux sur la bretelle d’accès ont rendu leur progression plus difficile que prévue. « Notre position n’est pas évidente. On fait encore un peu de sud pour toucher l’alizé mais on a du mal à y arriver. Nous faisons un peu moins de route avec un peu moins de vent. On est focalisé sur les gens du sud car le vent est établi jusqu’à l’arrivée. » De toute évidence, le péage du chemin de la délivrance semble devoir se payer au prix fort, cette année. Pendant ce temps, les inconditionnels de la route du sud persistent et signent comme l’équipage de Sojasun qui expliquait sa volonté de continuer à se décaler dans le sud pour rester constamment avec plus de pression que ses petits camarades de jeu.

A ce petit jeu de dupes, la langue de bois reste un sport favori. On veut bien avouer ses inquiétudes mais on les travestit, il s’agit de ne pas se trahir, de ne pas donner prise aux autres équipages qui doutent forcément tout autant… Seuls quelques vieux routiers jouent le jeu de la transparence tel un Dominic Vittet qui avouait avoir perdu ses illusions sur la route nord. Pour l’équipage de Gédimat , il s’agissait de plonger au sud pour tenter de coiffer sur le poteau les anciens collègues de misère. S’il s’avérait qu’Armel et Dominic avaient raison, cela voudrait dire que la route du sud l’aurait emporté et que les leaders de la course depuis le Cap Finisterre baisseraient pavillon. Et Dominic Vittet d’ajouter : « Il existe une certaine cruauté sur cette Transat… »

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