jeudi 15 mai 2008

Artemis Transat - Cervin Enr : meilleure distance parcouru sur 24 heures



Meilleure distance parcourue sur 24 heures (242,3 milles) et remonte en 9ème place au classement du matin.

« On nous disait : The Transat ? La plus dure, la plus tout…! Moi, j’ai l’impression de faire la Transat des Alizés ! se réjouit le skipper de Cervin EnR, de bonne humeur et heureux de réduire l’écart qui le sépare de ses concurrents directs, pas les cathédrales de la nouvelle génération, juste ceux qu’il a cochés sur sa black list : « Je suis sous genaker, le chrono affiche 11 nœuds, le vent est régulier et chaud ! J’ai à peine mis le ciré depuis le départ. Pas de baston à l’horizon… plutôt une zone de vent faible, incontournable, à négocier et pas très claire »

Si certains portent dèjà le bonnet et enfilent la deuxième polaire, Yannick Bestaven ne cache pas son plaisir de glisser à belle allure et d’engranger les milles perdus les premiers jours en bricolage et mise au point de l’électronique qu’il connaît maintenant sur le bout des doigts !


Que pense t’il du silence radio instauré par l’organisation pendant 24 heures, de vendredi 20 heurs à dimanche 8 H 00, heures françaises ?

« Ce n'est pas mal, ils auraient même pu la placer un peu plus tôt car les options se dessinent maintenant en tête de flotte, mais pour moi, ça ne changera pas grand-chose. Il y a deux courses, les bateaux neufs et les autres… Ils iront toujours plus vite. Il me faut trouver les routes les plus rapides et tirer le moins de bords possible ».

Yannick applique le dicton inversé « Quand on n’a pas de jambes, on a de la tête » ! Question cerveau, l’ingénieur est satisfait des modifications apportées au bateau. « Cervin EnR est agréable à la barre, ce n’était pas le cas auparavant, une galère à certaines allures ! A présent, il est sensible, aux doigts et à l’oreille, je sais s’il est bien réglé. Le nouveau plan de voilure est excellent, on borde mieux l’arrière, on trouve les bons angles. On ne s’est pas trompé, les évolutions sont bonnes, il en avait bien besoin ! »

La tentation du Sud ?

Le choix de cette route Sud évoque bien sûr le parcours triomphal de ses complices rochelais, Ronan Guérin et Luc Poupon, deuxième de l'AG2R et qui font partie du team sportif qu’il a fondé à la Rochelle autour des énergies renouvelables : « Ronan m’a appelé. J’ai pu le féliciter pour sa deuxième place, je suis super content pour lui et notre team « Energies autour du Monde ». Je savais bien, depuis le temps que je navigue avec lui, que c’est un garçon talentueux sur l’eau. Il a fait du bon boulot ! »

Source : Agence Gallois

Les écarts sont insignifiants entre les six leaders qui divergent très légèrement quant à la route à suivre. Marc Guillemot a repris la course malgré sa douleur aux côtes et Safran suit une route Sud. Les stratégies ne sont pas faciles à définir en raison d'une situation météo floue


Un repos bien mérité : voilà ce qui ressortait des commentaires des treize solitaires ce mercredi ! Il faut dire que le rythme a été extrêmement soutenu depuis trois jours et que les skippers ont investi beaucoup d'énergie pour ne pas se faire décrocher. Et de fait, ils sont encore six à batailler à quelques dizaines de milles les uns des autres, avec un léger avantage aux partisans d'une route très légèrement plus Nord. Les leaders se succèdent, mais pour combien de temps. Jusqu'à Boston ?
Que va-t-il se passer dans les deux jours à venir ? La question est dans les têtes des treize solitaires qui ont négocié une première dépression par sa face septentrionale et qui se retrouvent désormais dans un flux portant mollissant. Et plus les monocoques Imoca vont se rapprocher de l'Amérique, plus le vent va devenir instable, variable, irrégulier, voire aléatoire. Les skippers interrogés à la vacation radio de midi n'étaient d'ailleurs pas du tout sur la même longueur d'onde quant à savoir s'il fallait perdurer sur une voie proche de l'orthodromie à l'image des deux leaders, Michel Desjoyeaux (Foncia) et Yann Eliès (Generali), ou s'il fallait se décaler un peu plus au Sud comme Sébastien Josse (BT) et Vincent Riou (PRB) suivi par Armel Le Cléac'h (Brit Air). En position d'attente au centre, Loïck Peyron (Gitana Eighty) était en situation de changer d'orientation au cas où l'un des deux groupes tirait mieux son épingle du jeu.
Même topo pour les poursuivants qui, avec plus de 150 milles de retard, peuvent encore mieux se dérouter s'ils constatent que même ces deux voies s'engagent dans une impasse. Samantha Davies (Roxy) et Arnaud Boissières (Akena Vérandas) n'ont pas encore pris position dans ce choix cornélien, tout comme Dee Caffari (Aviva) et Unai Basurko (Pakea Bizkaia) qui concèdent déjà une journée de retard (250 milles). Seul Steve White (Spirit of Weymouth) reste fidèle à sa stratégie de départ : suivre une route Nord. A contrario, Marc Guillemot (Safran) et Yannick Bestaven (Cervin EnR) qui avaient tous deux plongé au Sud-Ouest au passage de la dépression pour cause, l'un d'incident corporel, l'autre de problèmes de pilote, ouvrent une troisième voie nettement plus Sud.

Black & White

Car les prévisions météorologiques sont très nettes : rien n'est clair ! Le vaste champ de pression qui se déroule devant les étraves pour les deux jours à venir n'est qu'une morne plaine fort peu vallonnée. Or la pression est concomitante à un relief atmosphérique et s'il n'y a ni collines (anticyclones), ni vallées (dépressions), le vent est comme une rivière : il ne coule pas très vite ! Et en l'occurrence, la possibilité est grande qu'une bulle de hautes pressions ou qu'un col de basses pressions se forme au gré d'une humeur éolienne impromptue : il peut fort bien y avoir un mince filet de brise à un endroit alors qu'il n'y a qu'un lac tranquille à quelques milles plus au Nord ou plus au Sud.
On pourra toujours arguer que 80 milles de décalage Nord-Sud entre Michel Desjoyeaux et Sébastien Josse ce mercredi après-midi pour aller parer un « way-point » (point de passage) à plus de 1 000 milles des étraves, sont bien insignifiants ! Certes, mais les modèles informatiques qui font tourner les routages (prédictions de route optimisée en fonction des prévisions météo et du potentiel du bateau) divergent selon qu'ils viennent des ordinateurs européens ou américains. Les uns ne voient nul changement apparent à se positionner plus ou moins Nord, les autres annoncent un avantage de quelques heures à se placer au Sud. Bref, machines ou marins, personne ne sait vraiment à quelle sauce il va naviguer !
Ce qui est certain, c'est que la Direction de Course a annoncé ce mercredi soir que les 36 heures de « black-out » prendraient effet vendredi soir. Ce qui signifie que, de vendredi à 20h (heure française) jusqu'à dimanche 8h (heure française), aucun solitaire n'aura les positions de ses concurrents. Or la journée de samedi sera justement un moment clé pour trier le bon grain de l'ivraie ! Et ce week-end sera aussi symptomatique de l'approche sur les bancs de Terre-Neuve, vers la « porte des glaces » qui doit empêcher les skippers de se fourvoyer dans les icebergs et autres growlers. Une sorte de trou noir dans une zone blanche !

Coup de pompe et coup de rein

Sur l'eau après trois journées complètes à tirer sur la machine, mais surtout à puiser dans les corps, il était temps qu'une petite pause s'installe pour recharger les batteries internes ! Quelques babioles à réparer ou à checker, histoire de ne pas se faire surprendre quand la brise va tourner au Sud-Ouest, pile dans le nez avec évidemment des dizaines de nœuds au compteur : un programme annoncé pour le week-end justement ! Mais aussi parce que ce rythme de Figariste est acceptable pendant deux jours, mais pas plus. Un monocoque de 60 pieds n'est pas un monotype de neuf mètres et sur la course Solitaire, il y a des étapes au bout de trois jours ! Ce mercredi, il en reste au moins neuf avant d'atteindre Boston.
Heureusement, la météo a été particulièrement clémente la nuit dernière pour grappiller quelques bonnes heures de repos et se sustenter plus solidement qu'une petite barrette de céréales. Les « accus » à bloc, les solitaires peuvent enfin lâcher la barre et se consacrer à la collecte des informations météo, histoire d'établir une stratégie même si elle n'a rien d'évident comme l'indique Loïck Peyron : « Ca va être le casino ! Il y a des petits ronds bleus (synonyme d'absence totale de vent) un peu partout sur les fichiers. Il faudra être dessus et être très réactif pour ne pas se faire piéger par les calmes ! » Après le coup de pompe du petit matin glauque de ce mercredi (ciel gris, visibilité réduite, température automnale, fort taux d'humidité), il va falloir donner un sacré coup de rein pour s'extraire de cette purée de pois, pour ne pas s'enliser dans ce marais atmosphérique.

Aucun commentaire: